Microflore : quand le ventre va, tout va
L’épiderme et les muqueuses des voies digestives, respiratoires et uro-génitales sont peuplés d’une microflore – appelée dorénavant microbiote – très complexe et instable qui les protège des agressions par les germes pathogènes de l’environnement (bactéries, champignons, virus) et par les parasites.
En réalité, cette microflore est en équilibre dynamique, qui peut être à tout moment rompu sous l’influence de différents facteurs : le terrain, les maladies infectieuses et fonctionnelles, les altérations anatomiques, les déséquilibres et les intoxications alimentaires, le stress et certains traitements thérapeutiques.
L’écosystème digestif ou microbiote est particulièrement important car il conditionne notre état de santé. Il est formé d’une microflore très abondante (de l’ordre de cent mille milliards de bactéries) de plusieurs centaines d’espèces différentes parmi lesquelles on distingue :
-
Une microflore de protection, formée d’espèces des genres Bacteroïdes, Lactobacillus, Bifidobacterium dont le rôle est de préserver l’hôte contre les troubles infectieux et dégénératifs.
-
Une microflore sous-dominante, formée d’entérocoques et d’entérobactéries, qui peut avoir une action protectrice ou infectieuse opportuniste, suivant les espèces microbiennes présentes et la résistance immunitaire de l’hôte.
-
Une microflore résiduelle fluctuante, formée entre autres de clostridies, de streptocoques, de staphylocoques, de levures et de champignons microscopiques et dont le pouvoir pathogène se manifeste lors d’une diminution de la flore de protection (par exemple en cas d’immunodéficience ou de certains traitements thérapeutiques).
De récentes recherches par le séquençage du génome (identification par l’ARN16S des espèces bactériennes) ont permis de diviser le microbiote humain en 3 embranchements : Formicutes, Bacteroidetes, et Actinobacteriae. Chaque individu possède son propre microbiote (carte d’identité bactérienne) mais 30% de l’ensemble des espèces bactériennes sont présents chez 60 % des individus.
Depuis plus de 30 ans, on sait que des bactéries probiotiques peuvent intervenir dans le traitement des troubles digestifs tels que la constipation et la diarrhée, mais plus récemment il a été mis en évidence qu'elles peuvent aussi jouer un rôle dans le traitement d'affections telles que l’obésité, le diabète de type 1, les allergies et la maladie de Crohn. Il faudra cependant attendre que le programme de recherche international MetaHIT en révèle davantage.
Les ennemis de la microflore
Les causes les plus courantes de déséquilibre du microbiote sont alimentaires : intolérance à certains aliments (lactose, protéines du lait de vache ou gluten des céréales), alimentation déséquilibrée (excès de sucres simples, de protéines et de graisses animales, insuffisance de fibres, déficit en minéraux, oligo-éléments ou vitamines), mauvaises habitudes culinaires (cuisson excessive entraînant la dénaturation des protéines et des graisses alimentaires et la production de toxines), abus de produits excitants (alcool, café, thé, piments forts, tabac…), manque d’hygiène domestique (défaut de lavage des fruits et légumes, défaut de traitement thermique, rupture de la chaîne du froid…), malnutrition (carence aiguë en protéines).
On peut aussi incriminer les maladies de terrain (déficit immunitaire, hyperthyroïdie, spasmophilie, insuffisance pancréatique…), certaines maladies inflammatoires (maladie coeliaque, maladie de Crohn, rectocolite hémorragique, tuberculose iléocæcale, sarcoïdose intestinale…), les altérations anatomiques ou fonctionnelles (blessures, mutilations chirurgicales, ulcération ou tumeur des voies digestives), le stress (pression morale ou physique, surmenage), mais aussi la prise de médicaments (antibiotiques, antiseptiques, vaccins, anti-inflammatoires).
En effet, depuis un demi-siècle, l’emploi abusif d’antibiotiques tant en élevage industriel qu’en thérapeutique humaine a favorisé la prolifération de germes antibiorésistants qui perturbent profondément les écosystèmes et favorise la réapparition de maladies infectieuses. Mais en cas d’infection, les antibiotiques naturels restent une arme efficace dans la mesure où ils sont utilisés avec parcimonie et seulement après avoir pratiqué une sélection par antibiogramme.
Les altérations de la microflore intestinale
L’étude du mécanisme de diffusion de la microflore intestinale a permis de mieux comprendre les causes d’une modification profonde de la flore de protection qui existe chez toute personne en bonne santé. Ainsi, après un traitement antibiotique, la microflore protectrice de l’intestin est en partie détruite, souvent au profit d’une flore potentiellement pathogène devenue résistante aux antibiotiques.
Au cours de la digestion, une fraction de la microflore entérique peut traverser la muqueuse intestinale par translocation, être transportée par le flux sanguin et retenue dans les zones inflammatoires ou mal irriguées par la circulation sanguine.
En temps normal le système immunitaire se charge de détruire ces germes intrus, mais il suffit d'une baisse momentanée de l'immunité et la présence de germes opportunistes ou pathogènes dans le colon, pour qu'ils occupent les zones inflammatoires de l'organisme et créent des foyers infectieux.
Les troubles qui en résultent
L’altération de la microflore digestive peut ainsi se manifester par des dysfonctionnements gastro-intestinaux (douleurs abdominales, ballonnements, flatulences, colites, diarrhées, alternance diarrhée-constipation), par des troubles qui leur sont associés (éruption épidermique, apathie, asthénie, nausée, vomissements, maux de tête, vertiges, malaises …) avec un risque d’extension de l’infection à la bouche (gingivite, parodontolyse), à l’épiderme (éruption, eczéma), aux organes uro-génitaux (vaginite, cystite, néphrite), aux articulations (rhumatismes infectieux), au cœur (endocardite), et dégénérer en septicémie en cas de forte immunodéficience.
Ajouter un commentaire