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LA SAGESSE DES ANCIENS
Sagesse de la Torah
Le peuple juif a survécu à son long exil grâce à l'observance minutieuse des Lois de la Torah. Selon le chemin de sagesse et de santé qu'elles enseignent, le bien-être physique reflète la santé spirituelle d'une personne, car la création spirituelle a précédé celle de l'être humain et la perfection spirituelle doit lui servir de modèle.
Outre les prières et les préceptes moraux, la Torah contient un certain nombre de principes pratiques visant à la santé - qui se rapproche de la sainteté. Les préceptes de la Torah commandent de rechercher sa propre perception morale en menant une vie simple tout en encourageant l'harmonie entre tous les êtres humains.
Tous ces préceptes enseignent un art de vivre fondé sur la simplicité et nous éclairent sur le style de vie frugal des Hébreux, sans doute guère différent de celui des fellahs égyptiens vivant, eux aussi, d'élevage et d'agriculture à l'ombre des splendeurs pharaoniques.
Les mitsvot régulant ce mode de vie constituent un entraînement permanent à respecter certaines règles d'hygiène et de prophylaxie. Ainsi, se sanctifier revient à se purifier en étant propre sur soi. Cette simple mesure de prévention évite que la gale et de graves maladies infectieuses, notamment la peste, ne se transmettent par les poux et les puces qui pullulent chez les populations sans hygiène.
Ces pratiques n'ont pas qu'un but prophylactique. Elles rappellent chaque jour que c'est dans la pureté spirituelle que l'être humain puise la force morale de surmonter les épreuves et toute forme d'égoïsme, ne serait-ce qu'en s'efforçant de "relever par la parole les coeurs accablés", selon les paroles du prophète Isaïe.
Le judaïsme est une doctrine de l'action selon laquelle l'être humain a pour mission de parfaire le monde resté volontairement inachevé par Dieu. Le Deutéronome ne cesse de le répéter : "Le plus important n'est pas la spéculation, mais l'action". Le judaïsme ne se limite donc pas au domaine moral, embrassant toutes les activités humaines, les mitsvot visent à les relier chacune au projet Divin. La vie quotidienne prend ainsi la dimension d'une vie religieuse dans tout le sens du terme "religion" dont la racine latine religere signifie "relier". En somme, la Torah invite l'humanité à accroître l'harmonie divine dans le monde.
Les Amérindiens, maîtres d'une sagesse nouvelle
Le monde industrialisé du XXIe siècle n'est-il pas entrain de découvrir, en retrouvant le chemin du sacré chez d'autres sociétés, qu'une troisième voie est possible - une forme de simplicité volontaire fondée sur un partenariat raisonné avec la nature, plutôt que de se résoudre à un choix manichéen entre la régression culturelle et le progrès techno-économique ?
Le "naturel" reviendrait-il au galop ? Comme stimulé par les problèmes de pollution pesant sur la santé humaine et environnementale dans les pays industrialisés ou non, un public de plus en plus large s'intéresse aux cultures dites "premières", à leur relation intime avec la nature. La simplicité volontaire du style de vie des sociétés amérindiennes à chamanisme attire autant leur rituels affirmant que l'être humain appartient à la terre et non l'inverse. Que vaut-il mieux : un progrès usant les humains et abusant de leurs ressources naturelles, ou bien un mode de vie qui pourrait sembler se figer dans une sorte de présent éternel, à l'instar de celui de ces sociétés à culture "première" ?
La conception du monde caractérisant les Amérindiens, du nord au sud du "Nouveau Continent", met en avant les liens unissant les humains à la Terre. Elle a largement influencé le mouvement environnementaliste.
Comme dans toutes les cultures, les guérisseurs ou les chamans recourent aux plantes. Les plantes guérisseuses, même les plantes "maîtres", font partie du monde végétal. Nous sommes en face de phénomènes observables : anabolisme et catabolisme comme chez les animaux et les humains. Elles ne peuvent pas donner accès à Dieu, à la Réalité Suprême, bref à celui qui est au-delà du monde phénoménal. Elles peuvent en revanche, par leur "sagesse" biologique, leur habitude de la relation équilibrée avec le milieu environnant, animal ou végétal, et les informations qu'elles véhiculent, nous aider à retrouver un état d'équilibre intérieur, jusqu'au niveau cellulaire et intracellulaire. Ce peut être une plate-forme de lancement mais le reste n'est pas du ressort de la plante, mais d'un travail personnel.
La "grande" plante des chamanes est l'ayahuasca. Elle est donnée rituellement, par des hommes de l'art, des chamans formés par un long apprentissage auprès d'un maître et qui sont parfaitement intégrés au milieu humain et à l'écosystème.
L'ayahuasca est souvent appelée la purga, la "purge", et son premier effet est la marectation, le "mal de mer", la "nausée". Elle réalise un nettoyage intérieur qui s'exprime généralement par vomissements et même par des diarrhées. Ce qu'il faut comprendre, c'est que ces vomissements sont des voies d'évacuation - entre autres, de traces de médicaments ou de drogues, parfois absorbés depuis longtemps. Outre cela, les vomissements peuvent être aussi sans vomissure ; ils expriment alors le besoin d'évacuer d'anciennes émotions somatisées.
Il y a aussi les visions ! Généralement, au début, on ne voit rien. Puis on peut avoir des expériences visuelles. Certains nouveaux venus les recherchent. On peut voir n'importe quoi ; il faut savoir trier et ne pas perdre le contrôle, sinon autant regarder un feuilleton à la télévision...
D'où viennent ces images ? Sans aucun doute de notre psychisme, depuis les couches les plus superficielles jusqu'aux couches les plus profondes de la psyché ; des souvenirs, des complexes chargés d'affects, jusqu'au refoulé personnel (où s'arrête l'inconscient freudien).
L'extension du champ de conscience engendré par l'ayahuasca dans une séance rituelle permet l'accès accéléré à des images qui pourraient aussi bien se manifester dans des rêves ou lors de séances d'imagination active. L'ayahuasca joue alors le rôle d'intermédiaire décodeur, comme sur certaines chaînes de télévision. Ces images peuvent se révéler être des clés permettant de trouver la solution à des problèmes qui nous encombrent, nous gâchent l'existence et peuvent même nous conduire à des comportements aussi préjudiciables que l'alcoolisme ou la toxicomanie.
Médecines africaines
En Afrique, la nature sauvage est omniprésente et partout le sacré s'exprime de manière assez troublante. Que ce soit dans le désert, la savane ou l'épaisseur verte et humide des forêts tropicales, seul compte l'essentiel.
Les plantes de la "brousse" ont été de tout temps utilisées par les populations africaines, soucieuses de se procurer les remèdes nécessaires à la guérison des maladies. L'expérience a montré qu'un grand nombre d'arbres et d'arbustes ont des pouvoirs de guérison couramment mis en oeuvre en médecine traditionnelle. L'utilisation de ces espèces végétales est très économique, alors que l'achat de remèdes importés d'Europe revient très cher et reste hors de la portée des bourses des classes modestes d'Afrique. Beaucoup d'espèces végétales sont faciles à récolter et à préparer, sans avoir recours à un matériel compliqué, c'est pourquoi elles forment la base des traitements effectués par les "guérisseurs" traditionnels qui en ont conservé les secrets d'âge en âge.
On doit compter aussi avec la connaissance pratique des vieillards sur les qualités des plantes médicinales, ainsi que celle des mamans, toujours habiles à confectionner des breuvages et préparations pour la guérison de leurs enfants. Notons aussi que les jeunes, dans la société traditionnelle, sont rapidement initiés au discernement des plantes médicinales et connaissent les noms, et souvent les propriétés, de la plupart des espèces de la brousse.
Il existe des approches corporelles et des séances publiques qui mettent les participants en transe. Ces pratiques sont systématiques chez les peuples où le vaudou représente une approche sacrée et thérapeutique, tels au Bénin et au Togo.
Il est maintenant établi que la transe, surtout lorsqu'elle est stimulée par des rythmes contrôles par des siècles d'expérience, permet à la pensée de se libérer de la volonté agissante ou, plus précisément, de sa capacité d'inhiber ce qui n'est pas "conforme" afin de laisser s'exprimer le système nerveux "instinctivomoteur". En effet, ce système ne dépend que très peu de la volonté. Il est également nommé "système neurovégétatif" ou "nerveux autonome" parce qu'il a pour fonction de régulariser les fonctions vitales du corps (rythmes cardiaque et respiratoire, motilité du système digestif...).
Le système neurovégétatif se distingue du système nerveux central en nous reliant en permanence à notre environnement. Il nous permet de nous y adapter en stimulant les fonctions homéostatiques de notre corps : régulation de la température interne, modificateur de notre rythme respiratoire, puis cardiaque. La transe qui accompagne les phénomènes de possession correspondrait donc, selon l'expression si parlante de Viviana Pâques (2), à "une remise en ordre de l'homme total".
La transe entraînant un abandon de la volonté, la conscience langagière s'estompe pour laisser place à ce que le Dr Jacques Donnars (3) décrit très joliment comme "une danse du corps qui chanterait le monde". La transe est pleinement atteinte en cet instant où "le corps et le monde vibrent à l'unisson". Alors, le patient parvient au pic d'une tension suivi d'une détente comparable au bien-être post-coïtal.
L'induction de la transe est une véritable technique thérapeutique illustrant combien les populations qui la pratiquent ont compris, de manière empirique, que cet équilibre (ce "bien-être physique, mental et social") qualifiant la santé dépend du fonctionnement harmonieux de cette part de nature existant en chaque être humain. A cet égard, le guérisseur mérite d'être reconnu comme un véritable "manager de la transe" et un élément de l'équilibre social.
La médecine arabe
La foi musulmane est indissociable de la pratique du jeûne rituel et de la prière. Du point de vue strictement thérapeutique, le jeûne remplit une fonction non seulement préventive, mais encore curative car désintoxicante. Le jeûne possède également une dimension éducative : celui qui le pratique apprend à se contrôler, à maîtriser ses pulsions et donc à élargir son champ de conscience. Par ailleurs, le jeûne du ramadan vise tout particulièrement à réduire l'égocentrisme "attitude consistant à tout rapporter à soi-même, accompagnée d'une certaine insensibilité à l'égard des autres" - il remplit aussi une fonction sociale en renforçant, autour de mêmes valeurs éthiques, la cohésion fraternelle des membres de la Oumma (4).
Le jeûne s'accompagne de prières que les médecins musulmans considèrent comme participant à la prévention de la santé mentale. En instaurant chez le croyant cinq fois par jour un état de concentration totale, générateur de calme et de sérénité, la prière favorise une profonde relaxation neuromusculaire grâce à laquelle les tensions de la vie quotidienne sont régulièrement évacuées.
Parvenu à cet état de méditation, le cerveau n'émet plus que des ondes alpha (soit huit à douze pulsations par seconde) même lorsque le sujet garde les yeux ouverts. Le rythme cardiaque ralentit jusqu'à ce que le coeur ne batte plus qu'à trente pulsations par minute.
Les médecines traditionnelles occidentales
Deux types de guérisseurs coexistent. Le guérisseur traditionnel est généralement magnétiseur, radiesthésiste ou les deux ensemble.
C'est l'homme d'une seule technique, considérée comme une panacée. Il prescrit peu de médicaments, ne fait aucun diagnostique et n'emploie pas ou peu de vocabulaire médical. Peu lui importe que le mal à l'estomac soit dû à une indigestion ou à un ulcère, son rôle consiste simplement à chasser la maladie. Devant un malade, il fait confiance à son "don" pour repérer la douleur et la soulager grâce à son fluide.
Ce dernier est mis en oeuvre de différentes manières. Certains se contentent de "passes" le long du corps et au-dessus des zones malades pendant quelques minutes. D'autres pratiquent l'imposition des mains en touchant réellement le patient. Enfin, une partie d'entre eux reste attachée à un rituel de guérissage : cercles magiques dessinés autour du malade, incantations, prières... Dans tous les cas, il est rare qu'on se déshabille chez ce type de guérisseur : le fluide se joue des vêtements. Les moins scrupuleux n'hésitent pas à traiter des cancéreux, parfois à distance, et témoignent de leur efficacité en disant : "je l'ai stabilisé" voire : "grâce à mon fluide, ils meurent plus proprement".
Les plus sérieux admettent leurs limites et respectent une véritable déontologie. Parmi les guérisseurs traditionnels se trouvent également des "spécialistes" qui ne traitent que les verrues, "enlèvent le feu" ou remettent les articulations démises grâce à leur don de rebouteux. Sans oublier les désensorceleurs, les désenvoûteurs, les guérisseurs de sorts qui délivrent du mal par un rituel magique.
Les magnétiseurs imposent les mains, soignent par les plantes, manipulent et vont jusqu'à désenvoûter...Il leur arrive de soulager et parfois même de guérir. Faut-il voir, dans ces résultats, l'effet des techniques employées, alors que l'on sait que le pouvoir est mineur ou de simple suggestion ? Ou bien la preuve d'un "don", d'une faculté particulière de déclencher chez l'autre l'autoguérison ?
Le magnétiseur reconnaît ouvertement, au risque de décevoir sa clientèle, ne pas pouvoir diagnostiquer. Il ignore tout de la maladie et de ses symptômes. Il traite en fonction de ses sensations et par leur reconnaissance par le patient. Cette reconnaissance de son efficacité établit la relation idéale entre le guérisseur et le malade : la foi réciproque au "don". C'est elle qui va déclencher, par un mécanisme inconnu, l'effet thérapeutique.
L'échange d'énergie, c'est ce fluide merveilleux qui passe entre un musicien et son auditoire, entre deux personnes qui font l'amour, entre deux amis dont l'un réconforte l'autre. Et aussi, entre un magnétiseur et son patient.
N'avons-nous jamais rêvé de maîtriser les éléments ? Quel être humain, en son for intérieur, n'a pas, une fois au moins, caressé secrètement l'espoir d'imprimer sa volonté sur tout ce qui l'entoure ?
Le magnétisme est l'un de ces fils d'or qui peuvent conduire sur le chemin de l'éveil et de la compréhension. De la révélation aussi. Il est d'abord ancré au plus profond de la matière, nous dévoilant les rythmes secrets, les influences vibratoires, les présences très denses, bien qu'impalpables, de tout ce qui fait notre vie quotidienne.
Le magnétisme nous sert de révélateur. Sur les champs énergétiques qui nous environnent, aussi bien que sur notre propre dimension, il introduit un rapport nouveau entre tout ce qui existe, un rapport qui n'est plus basé sur des concepts sociaux mais sur une réalité matérielle essentielle parce qu'inhérente à toute vie.
La médecine tibétaine
Elle partage avec la médecine indienne une conception commune de la "réalité". Des corps célestes aux corps des plus infimes créatures, toute substance dans l'univers n'est que le composé temporaire de cinq éléments - l'Air, le Feu, l'Eau, la Terre et le Vide ou Espace - dont chacun possède des qualités d'énergie spécifiques.
L'Air ou le Vent dans la nature, se retrouve dans le prâna, T'Chi en chinois et Ki en japonais - que la force vitale de l'être humain manifeste sous la forme du "souffle". Sa circulation harmonique et continue, dans le réseau des nâdi qui caractérise le corps humain, se traduit par ce qu'il est admis de nommer la "santé". Le terme nâdi est souvent traduit par "canal". Toutefois, à l'heure de l'électronique, le mot "circuit" semble sémantiquement plus approprié, car il exprime mieux l'idée que le prâna soit aussi un flux d'information, c'est-à-dire de conscience pouvant s'affiner au fur et à mesure que l'être humain parvient à se libérer des passions. Une bonne circulation du prâna permet à l'être humain de rester capable d'entretenir et maintenir dans notre "coresprit" - selon le terme forgé par Christian Godefroy - cet équilibre homéostasique que nous nommons la santé.
Quel que soit le niveau de conscience d'un être humain, le prâna qui l'anime est toujours en totale conjonction avec son corps - contrairement au paradigme mécaniste progressivement détrôné pendant la seconde moitié du XXe siècle.
Un nouveau rapport à la maladie
Pourquoi cette effervescence qui touche et les usagers et les praticiens ? S'agit-il d'une réaction de l'individu face à l'univers lourd et cloisonné de la médecine officielle ? D'une contestation "écologique" de médicaments trop "chimiques" ? Du refus de voir le corps réduit à ses seuls dysfonctionnements physiques et morcelé en de multiples spécialités ?
Si les médecines alternatives proposent un autre support à la maladie et d'autres modes de soins, leur séduction réside aussi, semble-t-il, dans ce qu'elles sont riches de représentations et de croyances sur l'être humain, le sens de l'existence, la place de l'homme dans l'Univers.
Le strict cadre de santé de la maladie, de la médecine est, ici, largement dépassé.
Dès lors, entre la médecine scientifique qui voudrait retrouver une dimension plus humaine et les médecines différentes en quête, pour la plupart, d'une reconnaissance officielle, une évolution et des réaménagements sont de plus en plus probables.
(2). Viviana Pâques, décédée en 2007 était professeur titulaire d'Ethnologie à l'université de Strasbourg, spécialiste de l'Afrique de l'Ouest.
(3). Le Dr Jacques Donnars, médecin psychosomaticien, a été l'un des précurseurs en France dans le domaine de la psychologie transpersonnelle, de la sofrologie et des thérapies par la transe.
(4). Oumma : communauté des croyants musulmans.